Le nationaliste de Sainte-Croix nie s’en prendre à Auschwitz
Philippe Brennenstuhl, président du Parti nationaliste suisse, fait appel d’une condamnation pour des propos sur internet. Il dit avoir visé le rapport Bergier, et non la Shoah.
Le nationaliste de Sainte-Croix nie s’en prendre à Auschwitz
Mercredi, le président du Parti nationaliste suisse (PNS), petit groupement d’extrême droite pour lequel il a été autrefois candidat au National, Philippe Brennenstuhl, comparaissait devant le Tribunal cantonal en appel d’une condamnation pour discrimination et incitation à la haine. L’audience se tenait dans une salle minuscule, dans le bâtiment administratif du Valentin, à Lausanne. Édifice qui est également le siège du Bureau cantonal pour l’intégration des étrangers et la prévention du racisme.
Les faits remontent à 2020. Sur la page du groupuscule, suivie par 5000 internautes, le retraité de Sainte-Croix s’énerve de la nouvelle publication des caricatures de «Charlie Hebdo»: «Sous le prétexte de «la liberté d’expression», on peut donc insulter 1,8 milliard de musulmans dans le monde, alors que relever des invraisemblances dans l’histoire de la Shoah vous emmène droit en prison! Pour le film documentaire «Hold-up», même traitement. On aimerait que ces organismes de censure aillent à Auschwitz pratiquer le même zèle de recherche historique et qu’ils relèvent les absurdités que l’on nous sert et ressert depuis 1945!»
La Cicad (Coordination intercommunautaire contre l’antisémitisme et la diffamation) avait porté plainte.
«Coup de gueule»
À la barre, l’intéressé se montre déterminé. Sa version diffère désormais un peu. Il s’agit d’un «malentendu»: le but était de critiquer le rapport Bergier, trop sévère à l’encontre de la Suisse et des refoulements aux frontières en 39-45. Auschwitz étant seulement cité comme symbole. «Mais je n’ai jamais nié les 6 millions, ni la souffrance du peuple juif, pendant cette période», martèle-t-il.
Le juge Marc Pellet s’énerve. «Auschwitz n’est pas un terme générique. C’est un camp de concentration!» Réponse: «Je ne suis pas un lettré, moi.»
Son défenseur, le Genevois Pascal Junod, ira plus en avant, dans une plaidoirie d’une heure mettant à mal la patience de la Cour. «Il n’y a rien dans ces deux phrases. Aucun élément subjectif ou objectif niant un génocide», dit-il, citant la jurisprudence de la norme pénale antiraciste, qui insiste sur l’importance des intentions discriminatoires de l’auteur.
«Auschwitz n’est pas un terme générique. C’est un camp de concentration!»
«Ce qui était des contre-vérités à l’époque du contre-rapport Bergier (ndlr: brochure révisionniste coéditée par Philippe Brennenstuhl en 2000) sont aujourd’hui des faits attestés par des historiens. Il y a eu de la propagande depuis la nuit des temps, et la deuxième guerre n’y échappe pas.» L’avocat, qui est aussi celui de l’idéologue controversé Alain Soral, poursuit. «Tout ce que mon client dit, c’est qu’il y a une géométrie variable dans ce qui peut être abordé ou non. Une échelle des souffrances. Il n’aurait eu aucun problème en parlant du génocide des Indiens d’Amérique du Nord.»
Il n’en aura pas besoin. La page Facebook du PNS est depuis tournée vers les «combats fratricides» en Ukraine. Le verdict sera communiqué par écrit dans les prochains jours.