Ce négationniste genevois inonde la Suisse de sa propagande antisémite
Récemment sorti de prison, un Genevois précédemment condamné pour infractions répétées à la norme antiraciste, récidive sur son site, son compte Twitter et par des e-mails envoyés tous azimuts.
La prison n’aura servi à rien. A. B., multirécidiviste, a replongé dans sa drogue favorite: le négationnisme. Au point que la Cicad (Coordination intercommunautaire contre l’antisémitisme et la diffamation) a adressé le 31 mars une nouvelle dénonciation au ministère public genevois, a appris watson auprès de Me Philippe Grumbach, avocat de la Cicad.
Qu’a fait de répréhensible A. B., un Genevois qui se présente sur son profil LinkedIn comme ancien journaliste pour un groupe de presse romand de 1996 à 2003, conseiller en assurances de 2008 à 2010 et actuel président de l’«Aide sanitaire suisse aux Palestiniens»?
Opposé à un mémorial de la Shoah à Genève
Depuis sa sortie de prison, que la Cicad situe en janvier de cette année, au terme d’une peine de six mois fermes prononcée par la justice genevoise pour des infractions répétées à la norme antiraciste, A. B. a repris ses activités délictuelles. Elles ont plusieurs formes:
- L’homme tient un site antisémite et négationniste, faisant entre autres l’apologie de la race blanche et du nazisme. Hébergé à l’étranger, par conséquent difficile à faire fermer, ce site est le successeur en droite ligne d’un autre, ouvert en Suisse par le même A. B. et dont la fermeture avait été ordonnée par la justice.
- Ce n’est pas tout: en février, «avec le laxisme d’Elon Musk», déplore la Cicad, A. B. a ouvert un compte Twitter, dont le nombre d’abonnés n’atteint toutefois pas les 200. Il y déploie sa propagande négationniste et s’en prend à des figures «juives» de la lutte anticonspirationniste.
- Enfin, et peut-être le plus imprudent de sa part, A. B. a multiplié ces dernières semaines l’envoi d’e-mails collectifs à des élus comme à des professeurs et doctorants d’universités romandes – peut-être a-t-il fait de même avec des académies alémaniques. Il s’y prévaut d’une lutte contre la «germanophobie».
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Dans l’un de ces messages, dont watson a obtenu copie, il réitère son opposition au projet de mémorial de la Shoah, soutenu par le Congrès juif mondial et la Cicad, qui doit prendre place devant le musée de l’Ariana, situé dans le quartier de la Genève internationale, non loin du siège des Nations Unies. A ce propos, en août 2021, il avait envoyé à plusieurs députés genevois une pétition contre ce projet de mémorial avec, pour argumentaire: «L’Holocauste est une fraude – La preuve par trois».
Avant sa condamnation à de la prison ferme l’an dernier, A. B. avait écopé d’une peine avec sursis en 2020, pour de mêmes motifs et à chaque fois à la suite de poursuites engagées par la Cicad.
Pourquoi un mémorial de la Shoah à Genève? La réponse de Johanne Gurfinkiel, secrétaire général de la Cicad:
«Parce que la Suisse appartient à l’Histoire européenne, parce qu’il y a eu des renvois aux frontières de juifs qui fuyaient les persécutions, mais aussi parce des juifs ont trouvé refuge en Suisse, parce que des Suisses ont aidé des juifs à traverser la frontière, notamment dans les environs de Genève, et qu’ils ont été faits pour cela Justes parmi les nations.»«Un sacré numéro»
Deux doctorants en histoire de l’Université de Lausanne, figurant parmi les destinataires d’un des courriels envoyés par A. B., indiquent l’avoir «détruit». «Il en avait déjà adressé un l’an dernier à tout le département d’histoire», croit se souvenir l’un d’eux. «Sans doute cherche-t-il à acquérir une légitimité en contactant des profils universitaires», suppose ce dernier, qui voit en A. B. un «sacré numéro».
Faut-il médiatiser ce «sacré numéro»? Pour le Français Jean-Yves Camus, codirecteur de l’Observatoire des radicalités politiques à la Fondation Jean Jaurès, «la Cicad est dans son rôle en poursuivant un tel personnage».
«Mais je considère que les négationnistes ont perdu la partie. Avec A. B., on a affaire à un néo-nazi pathologique»Emmanuel Deonna est l’un des destinataires involontaires d’un de ces e-mails aux relents négationnistes. Auteur d’articles sur l’histoire du Congrès juif mondial et de la Shoah parus dans des publications scientifiques, il siège pour quelque temps encore sur les bancs socialistes du Grand Conseil genevois. Lui-même petit-fils de rescapés et victimes de la Shoah, politiquement investi dans les problématiques génocidaires, cet envoi l’a «profondément blessé». «Je l’ai ressenti comme une agression», dit-il.