Dieudonné se produit en douce à l’Uptown
Dieudonné a réussi à se donner en spectacle dans la salle sous prétexte d’une conférence pour la promotion d’un film avec Franck Dubosc.
Dieudonné se produit en douce à l’Uptown
C’est à la surprise générale que s’est tenu, samedi 7 janvier à Genève, le nouveau spectacle de Dieudonné. La représentation a cependant été organisée à l’insu de l’Uptown, propriétaire de la salle de 450 personnes où elle s’est déroulée. Le comique est venu sous couvert d’une société événementielle, organisant la promotion d’un nouveau film à venir, à laquelle Franck Dubosc serait même prétendument présent.
Comptant déjà à son palmarès une vingtaine de condamnations en France, Dieudonné est encore en pleine procédure en Suisse. Ce dernier, connu pour ses nombreuses sorties polémiques, avait été condamné en appel en mai dernier à Genève pour «discrimination raciale, diffamation et injures». Cette condamnation était la conséquence de propos tenus en 2019, lors de ses passages à Genève et à Nyon. Il a cependant à nouveau fait recours dans l’affaire, qui sera par conséquent jugée par le Tribunal fédéral.
L’Uptown dupée
La salle de spectacle, qui affirme avoir «toujours refusé les spectacles de Dieudonné», déclare avoir été victime de tromperie. Emmanuel Clerc, son directeur, explique qu’il a été approché peu avant les Fêtes par une société événementielle, qui désirait louer une de leurs salles pour la promotion d’un futur film. «Il n’a jamais été fait mention d’un spectacle de Dieudonné. Lorsque nous nous sommes rendu compte de la supercherie, la salle était déjà pleine et nous n’avions pas les moyens de la faire évacuer de manière sécurisée», précise-t-il.
«Il n’a jamais été fait mention d’un spectacle de Dieudonné. Lorsque nous nous sommes rendu compte de la supercherie, la salle était déjà pleine et nous n’avions pas les moyens de la faire évacuer de manière sécurisée.»
Il met également en avant le fait que, à cause de l’approche des Fêtes et de la fermeture de la salle, la réservation s’est faite passablement en vitesse. Ainsi, n’ayant aucune raison d’avoir des soupçons, ils n’ont pas procédé à une vérification particulièrement approfondie de celle-ci.
Réaction de la CICAD
La Coordination intercommunautaire contre l’antisémitisme et la diffamation (CICAD), partie plaignante dans le jugement encore en cours de Dieudonné en Suisse, s’est immédiatement exprimée sur la tenue de cet événement. Elle déplore le caractère «raciste, antisémite et, pour la première fois, transphobe» du spectacle. Dans celui-ci, il joue, en plus de ses caricatures habituelles, un homme changeant 114 fois de genre qu’il compare à un «transporc». Elle note également la présence, à la représentation, d’autres figures polémiques telles qu’Alain Soral.
Johanne Gurfinkiel, secrétaire général de la CICAD, explique qu’il croit cependant en la bonne foi d’Emmanuel Clerc: «Nous avons discuté et il a été très clair et transparent. Il n’a pas délibérément accueilli ce spectacle. Il s’est simplement fait duper par un stratagème auquel Dieudonné a de plus en plus besoin d’avoir recours.»
L’association insiste néanmoins sur la nécessité de rester vigilants et de se mobiliser face à ce genre de manifestations. D’autant que l’intéressé s’était déjà rendu, le jour même, à un hommage au pianiste décédé Stéphane Blet, condamné par la justice française pour «injures en raison de l’origine».
Luc Barthassat présent
Luc Barthassat, ancien conseiller national et conseiller d’État à Genève, était également présent au spectacle. Il y a d’ailleurs été interrogé par un proche de Dieudonné. Dans la vidéo, depuis mise en ligne sur YouTube, il déclare «s’y rendre pour la première fois car invité par des amis, même s’il ne suit pas plus que ça l’humoriste».
«Malgré l’humour caustique et jouant parfois avec les limites, je n’ai rien relevé de particulièrement raciste ou antisémite durant le spectacle, explique-t-il. Ça ressemble beaucoup à l’humour un peu sans limites et provocateur qui se faisait dans les années 80. Seule la partie à propos des transgenres m’a fait un peu peur au début, même si au final il s’est moqué de tous les genres et de toutes les sexualités.»