La justice approuve le licenciement de Chloé Frammery
Pour la Chambre administrative, l’ex-fonctionnaire, révoquée en 2022, a violé à de multiples reprises ses devoirs de service. Son avocat évoque un recours possible devant le Tribunal fédéral.
La justice approuve le licenciement de Chloé Frammery
La justice confirme le licenciement de l’enseignante Chloé Frammery. Selon un arrêt de la Chambre administrative que la «Tribune de Genève» a consulté, l’ex-fonctionnaire, révoquée en 2022, a violé à de multiples reprises ses devoirs de service «tant dans le cadre scolaire que dans celui de ses activités extraprofessionnelles.» Huit griefs sont cités à l’encontre de l’enseignante du cycle connue pour ses positions coronasceptiques et antivaccins.
Il lui est notamment reproché «d’avoir mis en évidence, face à une caméra, ses trophées incarnant le symbole de la quenelle et les dédicaçant à la Coordination intercommunautaire contre l’antisémitisme et la diffamation (Cicad). Elle avait déjà été blâmée pour sa participation au Bal des quenelles 2019 (ndlr: cher à Dieudonné) et la publicité qu’elle avait donnée à cet événement. Elle devait ainsi s’attendre à l’ambiguïté que provoquerait l’exposition du symbole (de la quenelle), geste notoirement à connotation antisémite.»
Gilet jaune et ananas
Deuxième dérapage retenu: avoir diffusé des vidéos «comparant les mesures sanitaires en vue d’endiguer la pandémie de Covid-19 et celles imposées aux communautés juives durant la période nazie.» Elle disait vouloir «sensibiliser les gens sur la fragilité des droits et libertés […] et s’inscrire dans un débat public plus large concernant les libertés et les dérives totalitaires». Mais selon l’arrêt, elle ne pouvait ignorer qu’une telle comparaison allait susciter la controverse.
Il lui est aussi reproché d’avoir rediffusé des images «d’elle vêtue d’un gilet jaune orné d’un ananas – alors que ce comportement avait déjà été condamné par un blâme en 2020». Or l’ananas peut être assimilé à la chanson de Dieudonné jouant avec le terme Chaud Ananas et Shoah-nanas. Elle se défend en alléguant que l’ananas est un fruit et non une allusion antisémite ou un symbole nazi et que sa tenue ne pouvait pas être associée à cette chanson.
La justice pointe aussi du doigt le fait qu’elle ait évoqué publiquement les procédures administratives contre elle «parlant d’acharnement de son employeur, qui chercherait à la licencier en raison de ses activités privées et de ses relations amicales (ndlr: avec Dieudonné), ceci sous l’influence de la Cicad».
L’enseignante a par ailleurs publié sur un réseau social un courrier de la direction de l’enseignement sur le port du masque par les élèves du primaire. «Elle a pris position contre cette décision et invité les parents à manifester à son encontre», relève l’arrêt.
Fraude électorale
Il lui est également fait grief d’avoir, dans une interview, remis en question «la régularité des votations de novembre 2021 sur la loi Covid […] en fondant son analyse uniquement sur des témoignages indirects et sans vérifier ses dires». Chloé Frammery expose que ses propos ont concerné une votation en particulier, sur un sujet sensible, et que le risque de fraude électorale via les votes électroniques était notoire.
Enfin, il lui est reproché d’avoir, au cours de deux années scolaires, tenu devant deux classes des propos de nature dissuasive en pleine campagne de vaccination contre le papillomavirus. Elle a voulu informer ses élèves, dit-elle, de l’existence de la liberté vaccinale et du fait qu’ils disposaient d’un libre arbitre. «Elle est sortie du cadre de son rôle» concluent les juges.
«Je regrette cette décision purement politique.»
Me Pascal Junod, qui la défend, dit qu’un recours pourrait être déposé devant le Tribunal fédéral (TF): «La plupart des griefs adressés à ma cliente en relation avec les dénonciations qui portaient sur des interventions durant les cours ont tourné court dans le cadre de l’enquête administrative, tant les élèves, que les collègues ou les parents ayant témoigné en sa faveur pour souligner ses qualités.»
Selon l’avocat, «la Chambre a repris assez servilement les arguments soulevés dans la décision du Conseil d’État sans les développer véritablement. Mais le pire, c’est que, faute de pouvoir attaquer ma cliente sur les faits qui lui étaient initialement reprochés, la justice entérine les dénonciations de la Cicad qui n’est pourtant pas partie à la procédure.»
«À titre d’exemple, poursuit-il, le TF s’est penché sur la question de la quenelle dont la signification dépend au cas par cas des circonstances dans lesquelles elle a été effectuée, ce qui n’a au demeurant pas été le cas de l’enseignante, qui a simplement reçu une statuette, laquelle n’a jamais fait polémique en justice. Je regrette cette décision purement politique.»