Après l’attentat de Sydney. En Suisse romande, la communauté juive s’inquiète

Après l’attentat de Sydney. En Suisse romande, la communauté juive s’inquiète

À Genève, une condamnation plus ferme est attendue, tandis que, dans le canton de Vaud, police et responsables communautaires affirment leur vigilance.

 

En bref:

  • La communauté juive romande exprime inquiétude et tristesse après l’attentat antisémite.
  • Genève et Vaud renforcent discrètement leurs dispositifs de sécurité existants.
  • Les autorités genevoises condamnent fermement tout acte raciste et antisémite.
  • La Cicad réclame une parole politique forte contre les dérives antisémites.

Au lendemain de l’attentat antisémite perpétré dimanche sur la plage de Bondi, à Sydney, la communauté juive romande oscille entre émotion et incompréhension.

«Nous sommes inquiets et plongés dans la tristesse», déclare Elie Elkaim, président de la Communauté israélite de Lausanne et du canton de Vaud ( CILV). De son côté, la Coordination intercommunautaire contre l’antisémitisme et la diffamation ( Cicad) relève que la Suisse a condamné l’attaque, mais regrettait lundi matin l’absence de prise de parole des autorités cantonales genevoises.

Sur les réseaux sociaux, l’association a rendu hommage aux victimes – quinze morts et 42 blessés, fauchés en pleine célébration de Hanoukka – et rappelé que «l’antisémitisme tue». «Ce n’est pas un phénomène nouveau, il existe chez nous aussi», souligne Johanne Gurfinkiel, secrétaire général de la Cicad.

Genève condamne

Un appel entendu. Par la voix de sa Chancellerie, le Conseil d’État exprime lundi soir «ses plus sincères condoléances aux représentants de l’Australie à Genève». Il réitère sa position et «condamne avec fermeté tout acte ou propos raciste, antisémite et islamophobe». Le gouvernement genevois «s’associe à la douleur éprouvée par les personnes touchées par cette attaque terroriste et adresse toutes ses pensées émues aux familles des victimes, ainsi que ses vœux de rétablissement aux blessés».

Une position jugée toutefois décevante par Johanne Gurfinkiel. «En refusant de nommer explicitement l’antisémitisme, le Conseil d’État affaiblit la portée de sa réaction, estime-t-il. Face à une attaque visant des juifs en raison de ce qu’ils sont, une condamnation claire, spécifique et assumée était attendue.»

Sur le terrain sécuritaire, le Département des institutions et du numérique (DIN) assure suivre la situation de près. «La police analyse la situation à Genève en permanence et adapte son dispositif en fonction de ses appréciations», indique son porte-parole, Laurent Paoliello, qui précise ne pas pouvoir en dire plus «pour des raisons évidentes de sécurité».

Un dispositif sécuritaire adapté

Dans le canton de Vaud, la fusillade de Sydney n’a pas engendré de modifications majeures du dispositif sécuritaire en place. «Nous entretenons des contacts réguliers avec la communauté juive. Des informations que nous avons reçues, on peut dire que notre dispositif reste adapté et proportionné à la situation», assure le premier-lieutenant David Guisolan, chef de la section communication et relations publiques de la police cantonale vaudoise. Même son de cloche du côté de la police municipale lausannoise.

Des propos qui trouvent un écho direct auprès du patron de la boucherie casher de Lausanne. Gregory Melloul confirme: «Des normes ont été mises en place il y a quelque temps, en collaboration avec les responsables de la sécurité de la CILV. Elles ont été renforcées le 7 octobre 2023 et évoluent selon l’actualité.» Sans les détailler, il précise que de nouvelles mesures ont été ajoutées récemment, notamment à l’occasion de Hanoukka.

Lors de cette première soirée de célébration, des policiers municipaux se tenaient à proximité immédiate de la synagogue. «On sous-estime grandement ce qui se répand sur les réseaux sociaux et dans la rue, mais quand on fait appel à elles, les forces de l’ordre sont là et nous leur en sommes très reconnaissants», souligne Elie Elkaim.

«C’était tranquille depuis trente ans»

Pour la Cicad, si les dispositifs de protection sont indispensables, ils ne suffisent hélas pas. «La sécurité ne peut pas tout garantir. Nous avons besoin d’entendre une parole politique forte», insiste Johanne Gurfinkiel, qui rappelle qu’entre soutien à la cause palestinienne et dérives antisémites, «il existe une frontière claire» que les responsables publics doivent contribuer à tracer.

Elie Elkaim ne dit pas autre chose quand il évoque sa peur du «mécanisme de mimétisme». «À Sydney, c’était tranquille depuis trente ans, comme chez nous. Et pourtant, c’est arrivé… Mais on ne sait jamais quand ça va se passer!»